Parmi les papiers inédits de Walter Benjamin publiés en 1985 par Ralph Tiedemann et Hermann Schweppenhäuser dans le volume VI des Gesammelte Schriften (Suhrkamp Verlag), il y a un qui est particulièrement obscur, mais qui semble d’une étonnante actualité : « Le capitalisme comme religion ». Il s’agit de trois ou quatre pages, contenant aussi bien des notes que des références bibliographiques ; dense, paradoxal, parfois hermétique, le texte ne se laisse pas facilement déchiffrer. N’étant pas destiné à publication, l’auteur n’avait, bien entendu, aucun besoin de le rendre lisible et compréhensible… Les commentaires suivants sont une tentative partielle d’interprétation, fondée plutôt sur des hypothèses que des certitudes, et laissant certaines « zones d’ombre » de côté.
Le titre du fragment est directement emprunté au livre d’Ernst Bloch, Thomas Münzer, théologien de la revolution, publié en 1921 ; dans la conclusion du chapitre dédié à Calvin, l’auteur dénonçait dans la doctrine du reformateur génévois une manipulation qui va « détruire complètement » le christianisme et introduire « les éléments d’une nouvelle ‘religion’, celle du capitalisme érigé au rang de religion (Kapitalismus als religion) et devenu l’Eglise de Mammon ». [1]
Nous savons que Benjamin a lu ce livre, puisque dans une lettre à Gershom Scholem du 27.11.1921 il raconte : « Récemment il [Bloch] m’a donné, lors de sa première visite ici, les épreuves complètes du « Münzer » et j’ai commencé à les lire ». [2] Il semblerait donc que la date de rédaction du fragment n’est pas « milieu de 1921 au plus tard », comme indiqué par les éditeurs, mais plutôt « fin 1921 ». Soit dit en passant, Benjamin ne partageait pas du tout la thèse de son ami sur une trahison calviniste/protestante au vrai esprit du christianisme. [3]
Le texte de Benjamin est, de toute évidence, inspiré par L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme de Max Weber ; cet auteur est deux fois cité, d’abord dans le corps du document, et ensuite dans les notices bibliographiques, ou se trouve mentionnée l’édition de 1920 des Gesammelte Aufsätze sur Religionssoziologie, ainsi que l’ouvrage d’Ernst Troeltsch, Die Soziallehren der christlichen Kirchen und Gruppen, édition de 1912, qui défend, sur la question de l’origine du capitalisme, des thèses sensiblement identiques à celles de Weber. Cependant, comme nous verrons, l’argument de Benjamin va bien au-deélà de Weber, et, surtout, il remplace sa démarche « axiologiquement neutre » (Wertfrei) par un fulminant réquisitoire anticapitaliste.
« Il faut voir dans le capitalisme une religion » : c’est avec cette affirmation catégorique que s’ouvre le fragment. Il s’ensuit une référence, mais aussi une prise de distance par rapport à Weber : « Démontrer la structure religieuse du capitalisme — c’est-à-dire démontrer qu’il est non seulement une formation conditionnée par la religion, comme le pense Weber, mais un phénomène essentiellement religieux - nous entraînerait encore aujourd’hui dans les détours d’une polémique universelle démesurée ». Plus loin dans le texte la même idée revient, mais sous une forme quelque peu atténuée, en fait plus proche de l’argument wébérien : « Le christianisme, à l’époque de la Reforme, n’a pas favorisé l’avènement du capitalisme, il s’est transformé en capitalisme ». Ce n’est pas tellement loin de la conclusion de L’éthique protestante ! Ce qui est plus novateur c’est l’idée de la nature proprement religieuse du système capitaliste lui-même : il s’agit d’une thèse bien plus radicale que celle de Weber, même si elle s’appuie sur beaucoup d’éléments de son analyse. Benjamin continue : « Nous ne pouvons pas resserrer le filet dans lequel nous sommes pris. Plus loin cependant, ce point sera rapidement abordé ». Curieux argument… En quoi cette démonstration l’enfermerait dans le filet capitaliste ? En fait, le « point » ne sera pas « abordé plus loin » mais tout de suite, sous forme d’une démonstration, en bonne et due forme, de la nature religieuse du capitalisme :
« On peut néanmoins d’ores et déjà réconnaître dans le temps présent trois traits de cette structure religieuse du capitalisme ». Benjamin ne cite plus Weber, mais en fait les trois points se nourrissent d’idées et arguments du sociologue, tout en leur donnant une portée nouvelle, infiniment plus critique, plus radicale — socialement et politiquement, mais aussi du point de vue philosophique (théologique ?) — et parfaitement antagonique à la thèse wébérienne de la sécularisation.
« Premièrement, le capitalisme est une religion purement cultuelle, peut-être la plus extrêmement cultuelle qu’il y ait jamais eu. Rien en lui n’a de signification qui ne soit immédiatement en rapport avec le culte, il n’a ni dogme spécifique ni théologie. L’utilitarisme y gagne, de ce point de vue, sa coloration religieuse ». [4]
Donc, les pratiques utilitaires du capitalisme — investissement du capital, spéculations, opérations financières, manœuvres boursières, achat et vente de marchandises — sont l’équivalent d’un culte religieux. Le capitalisme ne demande pas l’adhésion à un credo, une doctrine ou une « théologie », ce qui compte ce sont les actions, qui relèvent, par leur dynamique sociale, de pratiques cultuelles. Benjamin, un peu en contradiction avec son argument sur la Réforme et le christianisme, compare cette religion capitaliste avec le paganisme originaire, lui aussi « immédiatement pratique » et sans préoccupations « transcendantes ».
Mais qu’est-ce qui permet d’assimiler ces pratiques économiques capitalistes à un « culte » ? Benjamin ne l’explique pas, mais il utilise, quelques lignes plus bas, le terme d’« adorateur » ; on peut donc considérer que le culte capitaliste comporte certaines divinités, qui sont l’objet d’adoration. Par exemple : « Comparaison entre les images de saints des différentes religions et les billets de banque des différents Etats ». L’argent, en forme de papier-monnaie, serait ainsi l’objet d’un culte analogue à celui des saints des religions « ordinaires ». Il est intéressant de noter que, dans un passage de Sens Unique, Benjamin compare les billets de banque avec des « façades de l’enfer » (Fassaden-architektur der Hölle) qui traduisent « le saint esprit de sérieux » du capitalisme. [5] Rappellons que dans la porte - ou la façade - de l’enfer de Dante se trouve l’inscription : « voi ch’entrate, lasciate cui ogni speranza » ; selon Marx, ce sont les mots inscrits par le capitaliste à l’entrée de l’usine à destination des ouvriers. Nous verons plus loin que, pour Benjamin, le désespoir est l’état religieux du monde dans le capitalisme.
Cependant, le papier-monnaie n’est qu’une des manifestations d’une divinité autrement plus fondamentale, dans le système cultuel capitaliste : l’argent, le dieu Mammon, ou, selon Benjamin, « Pluton… dieu de la richesse ». Dans la bibliographie du fragment est mentionné un virulent passage contre la puissance religieuse de l’argent : il se trouve dans le livre Aufruf zum Sozialismus, du penseur anarchiste juif/allemand Gustav Landauer, publié en 1919, peu avant l’assassinat de son auteur par des militaires contre-révolutionnaires. Dans la page indiquée par la notice bibliographique de Benjamin, Landauer écrit :
« Fritz Mauthner (Wörterbuch der Philosophie) a montré que le mot « Dieu » (Gott) est originairement identique avec « Idole » (Götze), et que les deux veulent dire « le fondu » [ou « le coulé »] (Gegossene). Dieu est un artefact fait par les humains, qui gagne une vie, attire vers lui les vies des humains, et finalement devient plus puissant que l’humanité.
« Le seul coulé (Gegossene), la seule idole (Götze), le seul Dieu (Gott), auquel les êtres humains ont donné vie, c’est l’argent (Geld). L’argent est artificiel et il est vivant, l’argent produit de l’argent et encore de l’argent, l’argent a toute la puissance du monde.
« Qui est-ce qui ne voit pas, qui ne voit pas encore aujourd’hui, que l’argent, que le Dieu n’est pas autre chose qu’un esprit issu des êtres humains, un esprit devenu une chose (Ding) vivante, un monstre (Unding), et qu’il est le sens (Sinn) devenu fou (Unsinn) de notre vie ? L’argent ne crée pas de richesse, il est la richesse ; il est la richesse en soi ; il n’y a pas d’autre riche que l’argent. » [6]
Certes, nous ne pouvons pas savoir jusqu’à quel point Benjamin partageait ce raisonnement de Landauer ; mais on peut, à titre d’hypothèse, considérer ce passage, mentionné dans la bibliographie, comme un exemple de ce qu’il entend par « pratiques cultuelles » du capitalisme. D’un point de vue marxiste, l’argent ne serait qu’une des manifestations – et pas la plus importante — du capital, mais Benjamin était beaucoup plus proche, en 1921, du socialisme romantique et libertaire d’un Gustav Landauer — ou d’un Georges Sorel — que de Karl Marx et Friedrich Engels. Ce n’est que plus tard, dans le Passagenwerk, qu’il va s’inspirer de Marx pour critiquer le culte fétichiste de la marchandise, et analyser les passages parisiens comme « temples du capital marchand ». Cependant, il y a aussi une certaine continuité entre le fragment de 1921 et les notes du grand livre inachevé des années 1930.
Donc, l’argent - or ou papier - la richesse, la marchandise, seraient quelques uns des divinités, ou idoles, de la religion capitaliste, et leur manipulation « pratique » dans la vie capitaliste courante des manifestations cultuelles, en dehors desquelles « rien n’a de la signification ».
Le deuxième trait du capitalisme « est étroitement lié à cette concrétion du culte : la durée du culte est permanente. Le capitalisme est la célébration d’un culte sans trêve et sans merci. Il n’y a pas de « jours ordinaires », pas de jour qui ne soit jour de fête, dans le sens terrible du déploiement de la pompe sacrée, de l’extrême tension qui habite l’adorateur ». Il est probable que Benjamin se soit inspiré des analyses de l’Ethique protestante sur les règles méthodiques de comportement du calvinisme/capitalisme, le contrôle permanent sur la conduite de vie, qui s’exprime notamment dans « la valorisation religieuse du travail professionnel dans le monde - celui qui est exercé sans relâche, continûment et systématiquement ». [7]
Sans relâche, sans trêve et sans merci : l’idée de Weber est reprise à son compte par Benjamin, au mot près ; non sans ironie d’ailleurs, en citant la permanence des « jours de fête » : en fait, les capitalistes puritains ont aboli la plupart des jours fériés catholiques, considérés comme un stimulant à l’oisiveté. Donc, dans la religion capitaliste, chaque jour voit le déploiement de la « pompe sacrée », c’est-à-dire des rituels de la Bourse ou de l’Usine, tandis que les adorateurs suivent, avec angoisse et une « extrême tension », la montée ou la chute du cours des actions. Les pratiques capitalistes ne connaissent pas de pause, elles dominent la vie des individus du matin au soir, du Printemps à l’Hiver, du berceau à la tombe. Comme l’observe bien Burkhardt Lindner, le fragment emprunte à Weber la conception du capitalisme comme système dynamique, en expansion globale, impossible à arrêter et auquel on ne peut pas échapper. [8]
Enfin, le troisième trait du capitalisme comme religion c’est son caractère culpabilisant : « Le capitalisme est probablement le premier exemple d’un culte qui n’est pas expiatoire (entsühnenden) mais culpabilisant. » On peut se demander quel serait, aux yeux de Benjamin, un exemple de culte expiatoire, opposé donc à l’esprit de la religion capitaliste. Comme le christianisme est considéré par le fragment comme inséparable du capitalisme, il se pourrait qu’il s’agit du Judaïsme, dont le jour férié le plus important est, comme l’on sait, le Yom Kippour, qu’on désigne d’habitude comme « le Jour du Pardon », mais la traduction la plus fidèle serait plutôt « le Jour de l’Expiation ». Il ne s’agit que d’une hypothèse, rien dans le texte ne l’indique.
Benjamin continue son réquisitoire contre la religion capitaliste : « En cela, le système religieux est précipité dans un mouvement monstrueux. Une conscience monstrueusement coupable qui ne sait pas expier, s’empare du culte, non pour y expier cette culpabilité, mais pour la rendre universelle, pour la faire entrer de force dans la conscience et, enfin et surtout, pour impliquer Dieu dans cette culpabilité, pour qu’il ait en fin de compte lui-même intérêt à l’expiation. » Benjamin évoque, dans ce contexte, ce qu’il appelle « l’ambiguïté démoniaque du mot Schuld » — c’est-à-dire, à la fois « dette » et « culpabilité » (la traduction française, « faute », est inadéquate). Selon Burkhard Lindner, la perspective historique du fragment est fondée sur la premisse que l’on ne peut pas séparer, dans le système de la réligion capitaliste, la « culpabilité mythique » et la dette économique. [9]
On trouve chez Max Weber des raisonnements analogues, qui jouent eux aussi sur les deux sens de devoir : pour le bourgeois puritain, « ce qu’on consacre à des fins personnelles est dérobé au service de la gloire de Dieu » ; on devient ainsi à la fois coupable et « endetté » envers Dieu. « L’idée que l’homme a des devoirs à l’égard des possessions qui lui ont été confiées et auxquelles il est subordonné comme un intendant dévoué (…) pèse sur la vie de tout son poids glaçant. Plus les possessions augmentent, plus lourd devient le sentiment de responsabilité (…) qui lui commende, pour la gloire de Dieu (…) de les accroître par un travail sans relâche ». [10] L’expression de Benjamin « faire entrer la culpabilité de force dans la conscience », correspond bien aux pratiques puritaines/capitalistes analysées par Weber.
Mais il me semble que l’argument de Benjamin est plus général : ce n’est pas seulement le capitaliste qui est coupable et « en dette » envers son capital : la culpabilité est universelle. Les pauvres sont coupables parce qu’ils ont échoué à faire de l’argent, et se sont endettés : puisque la réussite économique est, pour le calviniste, signe d’élection et de salut de l’âme (cf. Max Weber) le pauvre est, par définition, un damné. La Schuld est d’autant plus universelle qu’elle se transmet, à l’époque capitaliste, de génération en génération ; selon un passage d’Adam Müller — philosophe social romantique/conservateur, critique impitoyable du capitalisme — cité par Benjamin dans la bibliographie, « le malheur économique, qui dans des époques passées, était immédiatement porté (…) par la génération concernée et mourrait avec le décès de celle-ci, est actuellement, depuis que toute action et comportement s’exprime en or, dans des masses de dettes (Schuldmassen) de plus en plus lourdes, qui pèsent sur la génération suivante ». [11]
Dieu se trouve ainsi lui-même impliqué dans cette culpabilité générale : si les pauvres sont coupables et exclus de la grâce, et si, dans le capitalisme, ils sont condamnés à l’exclusion sociale, c’est parce que « c’est la volonté de Dieu », ou, ce qui est son équivalent en religion capitaliste, la volonté des marchés. Bien entendu, si l’on se situe du point de vue de ces pauvres et endettés, c’est Dieu qui est coupable, et avec lui, le capitalisme. Dans un cas comme dans l’autre, Dieu est inextricablement associé au processus de culpabilisation universelle.
Jusqu’ici on voit bien le point de départ wébérien du fragment, dans son analyse du capitalisme moderne comme religion issue d’une transformation du calvinisme ; mais il y a un passage où Benjamin semble attribuer au capitalisme une dimension transhistorique qui n’est plus celle de Weber - ni de Marx non plus :
« Le capitalisme s’est développé en Occident comme un parasite sur le christianisme - on doit le démontrer non seulement à propos du calvinisme, mais aussi des autres courants orthodoxes du christianisme - de telle sorte qu’en fin de compte l’histoire du christianisme est essentiellement celle de son parasite, le capitalisme ».
Benjamin ne livre nullement cette démonstration, mais il cite dans la bibliographie un livre, Der Geist der Bürgerlich-Kapitalistischen Gesellschaft (1914) dont l’auteur, un certain Bruno Archibald Fuchs, s’efforce — en vain — à démontrer, en polémique avec Weber, que les origines du monde capitaliste se trouvent déjà dans l’ascétisme des ordres monastiques et dans la centralisation papale de l’Eglise médiévale. [12]
Le résultat du processus « monstrueux » de culpabilisation capitaliste c’est la généralisation du désespoir : « Il tient à l’essence de ce mouvement religieux qu’est le capitalisme de persévérer jusqu’au bout, jusqu’à la complète culpabilisation finale de Dieu, jusqu’à un état du monde atteint par un désespoir que l’on espère tout juste encore. Ce que le capitalisme a d’historiquement inouï tient à ce que la religion n’est plus réforme mais ruine de l’être. Le désespoir s’étendant à l’état religieux du monde dont il faudrait attendre le salut. » Benjamin ajoute, en se référant à Nietzsche, que nous assistons à la « transition de la planète homme, suivant son orbite absolument solitaire, dans la maison du désespoir (Haus der Verzweiflung) ».
Pourquoi Nietzsche est-il mentionné dans cet étonnant diagnostique, d’inspiration poétique et astrologique ? Si le désespoir est l’absence radicale de tout espoir, il est parfaitement représenté par l’amor fati, « l’amour du destin » prêché par le philosophe au marteau dans Ecce Homo : « Ma formule pour la grandeur de l’homme est amor fati : ne rien vouloir d’autre que ce qui est, ni dans l’avenir, ni dans le passé, ni dans les siècles des siècles. Ne pas se contenter de supporter l’inéluctable (…) mais l’aimer ». [12]
Certes, il n’est pas question de capitalisme chez Nietzsche. C’est le nietzscheen Max Weber qui va constater, avec résignation — mais pas nécéssairement avec amour — le caractère inéluctable du capitalisme comme destin de l’époque moderne. C’est le sens des dernières pages de l’Ethique protestante, où Weber, constate, avec un fatalisme pessimiste, que le capitalisme moderne « détermine, avec une force irrésistible, le style de vie de l’ensemble des individus nés dans ce mécanisme - et pas seulement de ceux que concerne directement l’acquisition économique« . Cette contrainte il la compare à une sorte de prison, où le système de production rationnelle des marchandises enferme les individus : »Selon les vues de Baxter, le souci des biens extérieurs ne devait peser sur les épaules de ses saints qu’à la façon d’un ’léger manteau qu’à chaque instant l’on peut rejeter’. Mais la fatalité a transformé ce manteau en une cage d’acier« . [13] Il existe diverses interprétations ou traductions de l’expression stahlhartes Gehäuse : pour certains, il s’agirait d’une »cellule« , pour d’autres d’une carapace comme celle que porte l’escargot sur son dos. Il est cependant plus probable que l’image soit emprunté par Weber à la »cage de fer du désespoir" du poète puritain anglais Bunyan. [14]
Haus der Verzweiflung, Stallhartes Gehäuse, Iron cage of despair : de Weber à Benjamin nous nous trouvons dans un même champ sémantique, qui décrit l’impitoyable logique du système capitaliste. Mais pourquoi est-il producteur de désespoir ? On peut supposer différentes réponses à cette question :
tout d’abord parce que, comme nous l’avons vu, le capitalisme, se définissant lui-même comme la forme naturelle et nécessaire de l’économie moderne, n’admet aucun avenir différent, aucune issue, aucune alternative. Sa force est, écrit Weber, « irrésistible », et il se présente comme un destin (fatum) inévitable.
le système réduit la grande majorité de l’humanité à des « damnés de la terre », qui ne peuvent pas attendre leur salut de Dieu, celui-ci étant lui-même impliqué dans leur exclusion de la grâce. Coupables de leur propre destin, ils n’ont pas droit à aucune espérance de rédemption. Le Dieu de la religion capitaliste, l’Argent, n’a aucune pitié pour ceux qui n’ont pas d’argent…
Le capitalisme est « ruine de l’être », il substitue l’être par l’avoir, les qualités humaines par les quantités marchandes, les rapports humains par des rapports monétaires, les valeurs morales ou culturelles par la seule valeur qui vaut, l’argent. Ce thème n’apparaît pas dans le fragment, mais il est largement développé par les sources anti-capitalistes, socialistes/romantiques, que Benjamin cite dans sa bibliographie : Gustav Landauer, Georges Sorel - ainsi que, dans un contexte conservateur, Adam Müller. Il est à noter que le terme utilisé par Benjamin, Zertrümmerung, est apparenté avec celui qui décrit, dans la thèse IX « Sur le concept d’histoire », les ruines suscitées par le progrès : Trümmern.
La « culpabilité » des humains, leur endettement envers le Capital étant perpétuel et accroissant, aucun espoir d’expiation n’est permis. Le capitaliste doit constamment croître et élargir son capital, sous peine de disparaître face à ses concurrents, et le pauvre doit emprunter de l’argent pour payer ses dettes.
- Selon la religion du capital, le seul salut réside dans l’intensification du système, dans l’expansion capitaliste, dans l’accumulation des marchandises, mais cela ne fait qu’aggraver le désespoir. C’est ce que semble suggérer Benjamin avec la formule qui fait du désespoir un état religieux du monde « dont il faudrait attendre le salut ».
Ces hypothèses ne sont pas contradictoires ou exclusives, mais il n’y a pas d’indications explicites dans le texte qui permettent de trancher. Benjamin semble, néanmoins, associer le désespoir avec l’absence d’issue :
« La pauvreté, celle des moines gyrovagues, n’offre pas d’issue spirituelle (non pas matérielle). Un état qui offre si peu d’issue est culpabilisant. Les « soucis » sont l’index de cette conscience coupable de l’absence d’issue. Les « soucis » naissent dans la peur qu’il n’y ait pas d’issue, non pas matérielle et individuelle, mais communautaire ».
Les pratiques ascétiques des moines ne sont pas une issue, parce qu’elles ne mettent pas en question la domination de la religion du capital. Les issues purement individuelles sont une illusion, et une issue communautaire, collective, sociale, est interdite par la religion du capital. Cependant, pour Benjamin, adversaire convaincu de la religion capitaliste, il faudrait trouver une issue. Il examine ou passe en revue, brièvement, quelques-unes des propositions de « sortie du capitalisme » :
1) Une réforme de la religion capitaliste : elle est impossible, étant donnée sa perversité sans faille. « Il ne faut attendre l’expiation ni du culte même, ni de la reforme de cette religion, parce qu’il faudrait que cette reforme puisse s’appuyer sur un élément certain de cette religion, ni de l’abjuration de celle-ci ». L’abjuration n’est pas une issue, parce que purement individuelle : elle n’empêche pas les dieux du capital de continuer à exercer leur pouvoir sur la société. Quant à la réforme, voici, dans le livre de Gustav Landauer, ce passage dans la page suivante à celle citée par Benjamin : « Le Dieu [ argent] est déjà devenu si puissant et omnipotent, qu’on ne peut plus l’abolir par une simple restructuration, une réforme de l’économie mercantile (Tauschwirtschaft). » . 2) Le surhomme de Nietzsche. Pour Benjamin, loin d’être un adversaire, il est « le premier à entreprendre en connaissance de cause de réaliser la religion capitaliste. (…) Le pensée du surhomme déplace le « saut » apocalyptique, non dans la conversion, l’expiation, la purification et la contrition, mais dans une intensification (…). Le surhomme est l’homme historique qui est arrivé sans se convertir, qui a grandi en traversant le ciel. Nietzsche a porté préjudice à cette explosion du ciel provoquée par l’intensification de l’humain qui est et reste, du point de vue religieux (même pour Nietzsche), culpabilité ». [16]
Comment interpréter ce paragraphe passablement obscur ? Une lecture possible serait celle-ci : le surhomme ne fait qu’intensifier la hybris, le culte de la puissance et l’expansion à l’infini de la religion capitaliste ; il ne met pas en question la culpabilité et le desespoir des humains, il les abandonne à leur sort. C’est encore une tentative d’individus qui se veulent exceptionnels, ou d’une élite aristocratique, de sortir du cercle de fer de la religion capitaliste, mais qui ne fait que reproduire la logique de celle-ci. (Ce n’est qu’une hypothèse, j’avoue que cette critique de Nietzsche reste assez mystérieuse à mes yeux…)
3) Le socialisme de Marx : « chez Marx, le capitalisme qui ne se convertit pas devient socialisme par intérêt et intérêt composé qui sont fonction de la faute (voir l’ambiguïté démoniaque de ce mot) ». Il est vrai que Benjamin, à cette époque, ne connaissait pas grand-chose à l’œuvre de Marx. Il reprend probablement à son compte les critiques de Gustav Landauer au marxisme, qu’il accuse de vouloir établir une sorte de Kapitalsozialismus : pour Marx , selon le penseur anarchiste, « le capitalisme développe entièrement (ganz und gar) le socialisme à partir de lui-même, le mode de production socialiste « fleurit » (entblüht) à partir du capitalisme », notamment par la centralisation de la production et du crédit. [17] Mais on ne voit pas bien à quoi fait référence, dans le fragment, la « faute », en fait, Schuld, c’est-à-dire, à la fois « dette » et « culpabilité ». En tout cas, pour Benjamin, le socialisme marxien reste prisonnier des catégories de la religion capitaliste et ne représente donc pas une issue. Comme nous savons, il va considérablement changer d’opinion à ce sujet, à partir de 1924, après lecture d’Histoire et conscience de classe de Georges Lukacs.
4) Erich Unger et la sortie hors du capitalisme : « Dépassement du capitalisme par la marche à pied. Unger, Politik und Metaphysik, p. 44. ». Le terme Wanderung prête à confusion et la traduction française, trop littérale, est inadéquate. En fait, il ne s’agit pas de « marche à pied » mais plutôt de migration ou déplacement. Le terme qu’utilise Erich Unger est Wanderung der Völker, migration des peuples. Voici ce qu’il écrit, à la page 44 du livre cité par Benjamin :
« Il n’y a qu’un seul choix logique : soit le trafic sans friction, soit la migration des peuples. (…) L’attaque contre le « système capitaliste » est vouée éternellement à l’échec sur les lieux de sa validité (…) . Pour pouvoir accomplir quelque chose contre le capitalisme, il est indispensable, avant tout, de quitter (heraustreten) sa sphère d’efficacité (Wirkungsbereich), parce que, à l’intérieur de celle-ci il est capable d’absorber toute action contraire ». Il s’agit, ajoute-t-il, de remplacer la guerre civile par la Völkerwanderung. [19]
On sait que Benjamin avait de la sympathie pour les idées « anarchistes métaphysiques » d’Erich Unger, et qu’il le mentionne favorablement dans sa correspondance avec Scholem. Cependant, nous ne savons pas s’il considèrait cette « sortie hors de la sphère capitaliste » comme une issue valable. Le fragment ne nous donne aucune information à ce sujet. [20]
5) Le socialisme libertaire de Gustav Landauer, auteur de l’Aufruf zum Sozialismus. Dans la page suivant celle citée par Benjamin dans le fragment, le penseur anarchiste écrit :
« Le socialisme est retour [ou conversion] (Umkehr) ; le socialisme est un nouveau commencement ; le socialisme est un restauration du lien (Wiederanschluss) avec la nature, une re-infusion de l’esprit, une reconquête du rapport . (…) Les socialistes veulent donc à nouveau se rassembler dans des communes (Gemeinden) (…) ». [21]
Le terme utilisé par Landauer, Umkehr, est exactement celui que Benjamin emploie pour critiquer Nietzsche — dont le surhomme refuse « la conversion, l’expiation » (Umkehr, Sühne) et arrive au ciel sans se convertir (Umkehr) — et Marx, dont le socialisme n’est que « capitalisme qui ne se convertit pas (nicht umkehrende) ». On peut donc supposer — peut-être — que le socialisme de Landauer, impliquant une sorte de « conversion » ou « retour » — à la nature, aux rapports humains, à la vie communautaire — est la porte d’issue de la « maison du désespoir » construite par la religion capitaliste. Landauer n’était pas loin de croire, comme Erich Unger, qu’il fallait quitter la sphère de domination capitaliste, pour créer, à la campagne, des communes socialistes. Mais cette démarche n’était pas contradictoire, à ses yeux, avec la perspective de la révolution sociale : peu après la publication du livre, il va participer, comme commissaire du peuple à l’éducation, à l’ephémère République des Conseils de Munich (1919) — un engagement courageux qui lui coûtera la vie.
Dans un intéressant commentaire sur le concept de Umkehr dans le fragment de Benjamin, Norbert Bolz l’interprète comme une réponse à l’argument de Weber : le capitalisme comme destin inéluctable. Pour Benjamin, Umkehr signifierait à la fois interruption de l’histoire, Metanoia, expiation, purification et… révolution. [22]
Bien entendu, ce ne sont que des suppositions, le fragment lui-même n’indique aucune issue, et se contente d’analyser, avec effroi et une hostilité évidente, la logique impitoyable et « monstrueuse » de la religion du capital.
Dans les écrits de Benjamin des années 1930, notamment le Passagenwerk, cette problématique du capitalisme comme religion sera remplacée par la critique du fétichisme de la marchandise et du capital comme structure mythique. On peut sans doute montrer les affinités entre les deux approches — par exemple dans la référence à des aspects religieux du système capitaliste — mais les différences ne sont pas moins évidentes : le cadre théorique est devenu clairement celui du marxisme.
La problématique de Weber semble aussi disparaître du champ théorique construit par Benjamin ; cependant, dans les Thèses Sur le concept d’histoire on trouve une dernière référence, implicite mais assez identifiable, aux thèses wébériennes . Critiquant, dans la Thèse XI, le culte du travail industriel dans la social-démocratie allemande, Benjamin écrit : « Avec les ouvriers allemands, sous une forme sécularisée, la vieille éthique protestante du travail (protestantische Werkmoral) célébrait sa résurrection ». [23]
Inspiré par Max Weber, mais allant bien au-delà des arguments du sociologue, le fragment de 1921 de Benjamin appartient à une lignée de ce qu’on pourrait désigner comme les lectures anticapitalistes de Weber. Il s’agit, dans une large mesure, d’un « détournement » : l’attitude de Weber envers le capitalisme n’allait pas au-delà d’une certaine ambivalence, mélange de « neutralité axiologique », pessimisme et résignation. Or, certains de ses « disciples » infidèles vont utiliser les arguments de l’Ethique protestante pour développer un anticapitalisme virulent, d’inspiration socialiste/romantique.
Le premier dans cette lignée est Ernst Bloch, qui avait fait partie, dans les années 1912-14, du cercle des amis de Max Weber à Heidelberg. Comme nos avons vu, c’est Bloch qui a « inventé », dans son Thomas Münzer de 1921, l’expression « capitalisme comme religion » (Kapitalismus als religion), dont il attribue la responsabilité au calvinisme. [24] Le témoin appelé à charge de cette accusation n’est autre que... Max Weber : chez les disciples de Calvin « grâce au devoir abstrait de travailler, la production progresse de façon âpre et systématique, l’idéal de pauvreté, appliqué par Calvin à la seule consommation, contribue à la formation du capital. L’obligation de l’épargne s’impose à la richesse, cette dernière étant conçue comme une grandeur abstraite qui se suffit à elle-même et qui, d’elle-même, exige de s’accroître. (...) Comme l’a brillamment montré Max Weber, l’économie capitaliste en voie de dévéloppement se trouve totalement libérée, détachée, affranchie de tous les scrupules du christianisme primitif et, tout aussi bien, de ce que l’idéologie économique du Moyen Age gardait encore de relativement chrétien. » [25]
L’analyse « libre de jugement de valeurs » de Weber sur le rôle du calvinisme dans l’essor de l’esprit du capitalisme, devient, sous la plume du marxiste fasciné par le catholicisme qu’est Ernst Bloch, une féroce critique du capitalisme et de ses origines protestantes... [26] Comme nous l’avons vu, Benjamin s’est sans doute inspiré de ce texte, sans pour autant partager la sympathie de Bloch pour « les scrupules du christianisme primitif » ou le moment « relativement chrétien » de l’idéologie économique du catholicisme médiéval.
On trouve aussi, dans certains passages d’Histoire et Conscience de classe de Lukacs, des citations de Weber pour étayer sa critique de la réification capitaliste. Quelques années plus tard, c’est le tour du freudo-marxiste Erich Fromm, qui se réfère, dans un essai de 1932, à Weber et à Sombart pour dénoncer la responsabilité du calvinisme dans la destruction de l’idée du droit au bonheur, typique des sociétés précapitalistes — comme la culture catholique médiévale — et son remplacement par les normes éthiques bourgeoises : le devoir de travailler, d’acquérir et d’épargner. [27]
Le fragment de Benjamin, de 1921 est donc un des exemples de ces lectures « inventives »- toutes œuvre de penseurs juifs/allemands d’inspiration romantique – qui utilisent les travaux sociologiques de Weber, en particulier L’Ethique protestante et l’esprit du capitalisme, comme munitions pour monter une attaque en règle contre le système capitaliste, ses valeurs, ses pratiques et sa « religion ».
PS. Il serait intéressant de comparer « Le capitalisme comme religion » de Benjamin avec les travaux des théologiens de la libération latino-américains qui, sans connaître du tout le fragment de 1921, ont développé, à partir des années 1980, une critique radicale du capitalisme comme religion idolâtre. Ainsi, selon Hugo Assmann, c’est dans la théologie implicite du paradigme économique lui-même, et dans la pratique dévotionnelle fétichiste quotidienne que se manifeste la « religion économique » capitaliste. Les concepts explicitement religieux qu’on trouve dans la littérature du « christianisme de marché » — par exemple, dans les écrits des courants religieux néo-conservateurs, — n’ont qu’une fonction complémentaire. La théologie du marché, depuis Malthus jusqu’au dernier document de la Banque Mondiale, est une théologie férocement sacrificielle : elle exige des pauvres qu’ils offrent leur vie sur l’autel des idoles économiques. [28]
On trouve des arguments analogues chez le jeune théologien brésilien (d’origine coréenne) Jung Mo Sung, qui développe, dans son livre L’idolâtrie du capital et la mort des pauvres (1989), une critique éthico-religieuse du système capitaliste international, dont les institutions - comme le FMI ou la Banque Mondiale - condamnent, par la logique implacable de la dette externe, des millions de pauvres du Tiers Monde à se sacrifier pour le dieu « marché mondial ». Pour la religion capitaliste « hors du marché il n’y a pas de salut . (…) Grâce à cette sacralisation du marché, il n’est pas possible de penser la libération par rapport à ce système et une autre alternative. On ferme toutes les portes pour la transcendance, aussi bien en termes historiques (un autre modèle de société au-delà du capitalisme) qu’en termes de transcendance absolue (il n’y a pas d’autre Dieu au-delà du Marché) ». [29]
Les analogies - ainsi que les différences - avec les idées de Benjamin sont évidentes. Mais cela nous éloignerait trop du sujet de cette communication…
Notes
1. E. Bloch, Thomas Münzer, théologien de la révolution, Paris, 10/18, 1964, traduction de Maurice de Gandillac, p. 182-183. Cf. Ernst Bloch, Thomas Münzer als Theologue der Revolution, 1921, Frankfort, Suhrkamp Verlag, 1962. Dans cette réédition Bloch a remplacé « Eglise de Satan » par « Eglise de Mammon ».
2. W.Benjamin, Gesammelte Briefe, Frankfort, Suhkamp, Bd.II, pp. 212-213
3. Sur le rapport de Benjamin à Bloch à ce sujet, cf. Werner Hammacher « Schuldgeschichte », in Dirk Baecker, Kapitalismus als Religion, Berlin, Kulturverlag Kadmos, 2003, pp. 91-92.
4. W.Benjamin, « Le capitalisme comme religion », in Fragments philosophiques, politiques, critiques, littéraires, edités par R.Tiedemann et H.Schwepenhäuser, Traduit de l’allemand par Christophe Jouanlanne et Jean-François Poirier, Paris, PUF, 2000, pp. 111-113. Toutes les références au fragment concernent ces trois pages, je m’abstient donc de citer à chaque fois la page concernée.
5. W.Benjamin, Einbahnstrasse, in Gesammelte Schriften, Band IV, 2001, p.139.
6. Gustav Landauer, Aufruf zum Sozialismus, Berlin, Paul Cassirer, 1919, p. 144.
7. Max Weber, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 2001, trad. Jean-Pierre Grossein, p.235. Souligne par moi ML.
8. B. Lindner, « Der 11.9.2001 oder Kapitalismus als Religion », in Nikolaus Müller Schöll (hg.), Ereignis. Eine fundamentale Kategorie der Zeiterfahrung. Anspuch und Aporien, Bielefeld, 2003, p. 201.
9. B.Lindner, Ibid. p. 207.
10. Max Weber, L’éthique protestante… pp. 230,232.
11. Adam Müller, Zwölf Reden über die Beredsamkeit und deren Verfall in Deutschland, 1816, p. 58.
12. B. A. Fuchs, Der Geist der Bürgerlich-Kapitalistischen Gesellschaft, (München, Verlag von R.Oldenbourg,, 1914, pp. 14-18.
13. Max Weber, L’Ethique protestante et l’esprit du capitalisme, pp.222-225.
14. Cf. Tiryakian, E., « The Sociological Import of a Metaphor : Tracking the Source of Max Weber’s ’Iron Cage’ », dans P.Hamilton (ed.), Max Weber : Critical Assessments, Londres, Routledge, 1991, vol. I, 2, pp. 109-120.
15. G. Landauer, Aufruf zum Sozialismus, p. 145.
16. J’ai corrigé la traduction française par l’original allemand, Gesammelte Schriften, VI, p. 102.
17. G. Landauer, Aufruf zum Sozialismus, p. 42.
18. W. Benjamin, « Le capitalisme comme religion », in Fragments philosophiques, politiques, critiques, littéraires, Traduit de l’allemand par Christophe Jouanlanne et Jean-François Poirier, Paris, PUF, 2000, pp. 113.
19. Erich Unger, Politik und Metaphysik, 1921, (hrsg. Von Mangred Voigt), Würzburg, Könnigshausen & Neumann, 1989, p. 44.
20. Selon Joachim von Soosten, tandis que Unger cherche une sortie du capitalisme dans l’espace, Benjamin pense en termes eschatologiques temporels. (Cf « Schwarzer Freitag : die Diabolik der Erlösung und die Symbolik des Geldes », in Dirk Baecker (Hsg.), Kapitalismus als Religion, berlin, Kulturverlag Kadmos, 2003, p.297)
21. G.Landauer, Aufruf zum Sozialismus, p. 145.
22. N.Bolz, « Der Kapitalismus - eine Erfindung von Theologen ? », in Dierk Baecker (hrsg.), Kapitalismus als Religion, p. 205.
23. W. Benjamin, « Über den Begriff der Geschichte », Gesammelte Schriften, I, 2 p. 274.
24. Ernst Bloch, Thomas Münzer, théologien de la révolution, Paris, 10 /18, 1970, p. 182-183.
25. Ibid, pp. 176-177.
27. Cf. E. Fromm, « Die psychoanalythische Charakterologie und ihre Bedeutung für die Sozialpsycholgie », 1932, in Gesamtausgabe, Stuttgart, Deutsche Verlag-Anstalt, 1980, vol. I, pp. 59-77.
28. H. Assmann, F.Hinkelammert (1989), A Idolatria do Mercado. Ensaio sobre Economia e Teologia, Vozes, S.Paulo.
29. Jung Mo Sung, Deus numa economia sem coraçâo. Pobreza e neoliberalisme : um desafio oà evnagelizaçâo, S.Paulo, Ed. Paulinas, 1992, p. 94.